Dans un monde où l’image occupe une place centrale, Cassandrine Destima, jeune photographe haïtienne, s’attache à explorer la mémoire collective à travers son objectif. Avec son projet Rétro Shoot, lancé mi-novembre, elle mêle nostalgie et modernité pour offrir une vision artistique qui transcende les époques.
Née à Plaisance du Nord, Cassandrine grandit à Sarthe, dans la commune de Cité Soleil. Une enfance qu’elle décrit comme paisible, mais marquée par sa timidité. Au fil des années, elle se découvre une volonté de dépasser les limites imposées par son environnement.
Après des études secondaires au lycée Jean-Marie Vincent et à l’institution mixte Shékinah, elle intègre l’Université Mont Everest d’Haïti. Pour soutenir ses parents tout en étudiant, elle apprend la photographie, un domaine qui va profondément transformer sa trajectoire.
“Je dirais que c’est la photographie qui m’a choisie”, confie-t-elle, émue lors d’une entrevue avec Chokarella. Cette rencontre décisive avec des formateurs du programme Kamera m Chanje Vim (KCV), dont Glaude Evens, Mondesir Sarah Joseph Mackenson Guerrier et Carlin Trezil marque le début de sa passion pour l’image.
Aujourd’hui vice-présidente de l’Association des Femmes Photographes d’Haïti (AFPHA), Cassandrine trouve dans ce rôle une occasion unique de promouvoir les femmes dans un domaine souvent dominé par les hommes.
Redonner vie au passé avec Rétro Shoot
Parmi ses projets les plus marquants, rétro shoot occupe une place spéciale. Depuis ses débuts, Cassandrine rêve de recréer l’élégance et la beauté des époques passées. À travers des accessoires vintage, des décors naturels et une mise en scène soignée, elle propose une expérience photographique qui va au-delà du simple portrait.
“Ce qui me fascine, c’est la recréation d’une époque à travers mon objectif”, explique-t-elle. Pour elle, chaque séance photo est une exploration artistique et culturelle. Son objectif est clair : “Montrer qu’en regardant dans le passé, on peut mieux apprécier le présent et façonner le futur.”
L’authenticité guide son travail, privilégiant les décors naturels, qu’elle juge plus riches et originaux que les studios. “Le décor naturel donne l’impression d’une véritable immersion dans l’époque”, souligne-t-elle, en valorisant les paysages et l’architecture d’Haïti.
Recréer un moment historique, qu’elle n’a pas vécu, représente un défi de taille : “C’est un défi constant de recréer un moment où je n’étais même pas née, mais c’est aussi ce qui rend ce concept si spécial”, confie-t-elle.
Une artiste résiliente face aux défis
Être photographe en Haïti, surtout dans le contexte actuel, n’est pas sans obstacles. L’insécurité est un frein majeur. “Nous sommes souvent incapables d’accéder à des lieux essentiels pour nos séances photo”, avoue-t-elle. Mais Cassandrine refuse de se laisser décourager. Sa créativité est sa force, et c’est avec cette énergie qu’elle surmonte les limitations quotidiennes.
Le soutien de ses proches et de ses clients joue un rôle crucial dans sa résilience. Certains vont même jusqu’à lui prêter du matériel ou l’aider avec la retouche. Cette solidarité est essentielle à sa poursuite.
Des ambitions audacieuses pour l’avenir
Cassandrine nourrit de grandes ambitions pour l’avenir. “Je veux être une photographe reconnue mondialement, participer à des expositions internationales et vendre une image positive de mon pays”, déclare-t-elle. Mais ses projets ne s’arrêtent pas là : elle aspire également à ouvrir sa propre galerie de photographie, dédiée à ses œuvres et à celles de jeunes talents qu’elle souhaite soutenir. Parallèlement, elle rêve de créer une agence d’image pour promouvoir la créativité et l’excellence artistique en Haïti.
À travers son travail, elle espère transmettre un message fort : “Il faut parfois se tourner vers le passé pour mieux comprendre et apprécier le présent.”
L’histoire de Cassandrine Destima est celle d’une jeune femme qui, grâce à sa passion et à sa détermination, a su s’imposer dans un domaine exigeant. Par ses clichés rétro, elle ne capture pas seulement des images, elle raconte des histoires, immortalise des époques et inspire les autres à rêver grand.
Par John Wilson Felix © Chokarella